Échange avec Louis Gallois, grand patron philanthrope

Louis Gallois, pourriez-vous vous définir en quelques phrases ?

Je suis un provincial, né à Montauban et attaché à ma région d’origine. J’ai eu trois vies actives : d’abord fonctionnaire au service de l’État, ensuite dirigeant d’entreprise, enfin militant associatif à la Fédération des Acteurs de la Solidarité et maintenant dans l’expérimentation Zéro Chômeur. Ces trois vies m’ont façonné. J’ajoute que je me définis comme un républicain aimant son pays, attaché à l’intérêt général, navigant entre Clémenceau, Jaurès et de Gaulle !

Vous avez un CV qui coche toutes les cases du succès, avez-vous un regret ?

J’ai eu beaucoup de chance et j’ai peu de regrets même si j’aurais souvent pu faire mieux. En fait,  je regarde peu en arrière ; ce qui m’intéresse c’est ce qui est devant …mais l’horizon se raccourcit chaque jour !

Une fierté ?

Plusieurs heureusement ! Mais ça fait partie de mon jardin secret.

La violence du contexte économique est extrême pour bon nombre de nos concitoyens et particulièrement pour les étudiants. Que souhaitez-vous à la jeunesse d’aujourd’hui ?

La jeunesse est particulièrement touchée par la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales. Cela concerne  aussi bien les étudiants que les jeunes sans formation, sans emploi et sans revenu. Une grande initiative nationale me paraît nécessaire en direction des jeunes les plus fragiles. Je propose l’extension du RSA aux 18-25 ans avec un véritable accompagnement vers l’emploi. La contrepartie serait que le jeune qui refuserait un emploi « raisonnable » en termes de qualification ou de situation géographique perdrait le bénéfice de cette allocation. Au démarrage, le RSA jeunes pourrait être financé par un impôt de solidarité temporaire (2 ans) sur les tranches les plus élevées de l’impôt sur le revenu. Les personnes les plus aisées ont beaucoup moins souffert de la crise sanitaire que les personnes en situation de précarité et en particulier que les jeunes pauvres.

Quelle est pour vous la grande différence entre la génération X et la génération Y ?

Nous ne mesurons pas encore pleinement la rupture générationnelle que suscite le numérique, internet et les réseaux sociaux. La génération X était encore largement « formatée » par les supports classiques de la communication : livres, journaux, téléphone. La génération Y a des repères assez radicalement différents : elle se cultive et s’informe quasi exclusivement sur internet et cette information est segmentée et rarement contextualisée ; les liens sociaux sont assurés par les réseaux du même nom dans une immédiateté absolue. Les spécialistes indiquent que ces profondes transformations modèlent jusqu’au fonctionnement du cerveau. Le risque c’est la difficulté de dialogue et de compréhension réciproque entre les générations. Il faut y être attentif car c’est la cohésion et le fonctionnement même de nos sociétés qui est en cause.

Est-ce que vous vous considérez comme philanthrope ? Pourquoi n’êtes-vous pas friand du terme « philanthropie » ?

Je ne raffole pas du terme de philanthropie, largement utilisé dans les pays anglosaxons, car il fait souvent référence aux « riches » qui se donnent bonne conscience ou assurent leur statut social en montrant leur générosité. Ceci dit, derrière ce terme, il y a aussi beaucoup de gestes sincères et très utiles qu’il faut reconnaître…et stimuler !

Vous parlez même de la générosité comme d’une forme d’hygiène de vie, Pourriez-vous nous expliquer ce que vous entendez par là ?

Manque de chance, j’utilise peu le terme de générosité ! Je préfère celui de solidarité. Il faut autant que possible éviter ce qui donne le sentiment que le donateur est en « surplomb » par rapport à celui qui reçoit. J’aime bien faire référence à la fraternité, aux racines aussi chrétiennes que républicaines. Je crois que tout ce qui nous conduit à participer à la vie de la Cité, tout ce qui « fait société »  nous permet de mieux vivre notre condition humaine. Une société solidaire, c’est une société plus rassemblée, plus démocratique, plus robuste face aux crises. Alors, oui, ça devient une hygiène de vie.

Selon vous, quel dispositif l’état pourrait-il mettre en place pour davantage encourager la générosité des français au profit du bien commun ?

Les mécanismes fiscaux en place sont assez puissants aussi bien pour les dons que pour les legs même si la transformation de l’ISF en IFI a pesé sur la collecte des associations. Je ne suis pas sûr qu’il faille en rajouter.  De toutes façons, il y a une limite aux avantages fiscaux au-delà de laquelle, de fait, l’effort de l’État se substitue à celui des donateurs. En revanche je crois que les associations elles-mêmes pourraient être mieux reconnues et soutenues car elles accomplissent une véritable mission de service public. Dans quel état serait le tissu social français si les associations n’agissaient pas quotidiennement au plus près des personnes en difficulté.

Louis, à part une bonne santé, que puis-je vous souhaiter pour les années qui viennent ?

Vous pouvez me souhaiter de continuer à avoir des projets qui me stimulent et me conduisent à m’intéresser au monde qui m’entoure et, bien sûr, de jouir de ma famille et de mes amis. L’homme est un animal social. La solitude des personnes âgées est un drame.

Amélie de Valence

Correspondante philanthropie

Photographie : (c) Frédéric Legrand / COMEO

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